la pauvreté n’est pas un phénomène unidimensionnel pouvant être résolu de façon sectorielle.C'est d’un problème multidimensionnel qui nécessite des solutions multisectorielles.

Les droits des femmes sont des droits, théoriques ou réels, dont la défense est un objectif afin de parvenir à une société plus égalitaire.

tout être humain âgé de moins de dix-huit ans, sauf si la majorité est atteinte plus tôt en vertu de la législation qui lui est applicable

L’éducation est un droit essentiel, qui permet à chacun de recevoir une instruction et de s’épanouir dans sa vie sociale.

S’il n’y a pas de vie, les autres droits fondamentaux n’ont plus de raison d’exister.Le droit à la vie est un droit universellement reconnu pour tous les êtres humains.

Transition du MPSR-II : L’OPTION TOUT MILITAIRE EST UNE IMPASSE POLITIQUE



Alors que ses résultats sécuritaires sont inconsistants

et qu’il se perd à vouloir gérer toutes les petites affaires de l’État,

le régime d’exception militaire du MPSR-II est de plus en plus

nerveux, ouvrant une vaste chasse aux sorcières contre ceux

qui mettent un point d’honneur à appeler un chat un chat.

              I- La république contre le faso ?

Réglage logistique. Devant un patient dont la fièvre persiste, il y a le médecin qui, affrontant la réalité en face, n’a de cesse de chercher un autre remède, quel qu’il soit, y compris contre son premier diagnostic ; et il y a le médecin qui, fuyant la réalité, casse le thermomètre pour ne pas dédire son premier diagnostic, au risque de mettre la vie de son patient en danger. Le premier accepte l’échec sans baisser les bras ; le second le refuse sans remettre en cause sa médecine.

Telle est aujourd’hui la situation du Burkina Faso. Attaqué par une terrible maladie qui ne veut pas rendre les armes, ceux qui sont expressément chargés de la combattre n’ont plus d’autre remède pour faire taire les détracteurs qui leur renvoient la réalité de la situation militaire en pleine figure que de casser le thermomètre. Même les plus modérés ne comprennent pas cette obstination à appliquer un remède sans résultats tangibles depuis huit mois déjà, nonobstant les promesses tonitruantes ayant accompagné l’arrivée au pouvoir des militaires du MPSR-II — tout, ou presque, n’était que question de réglage logistique…

Chasse aux sorcières. La propagande ayant perdu tout effet, et les menaces répétées à l’envi tournant au ridicule, voilà qu’une vaste chasse aux sorcières est lancée contre tous ceux qui portent sur le devant de la scène, à haute et intelligible voix, sans plus de précaution, ce qu’une grande partie des Burkinabè pensent tout bas. Par définition, cette majorité silencieuse est moins bruyante que les groupes d’activistes intéressés personnellement au maintien au pouvoir des militaires du MPSR-II, mais pourtant elle n’est pas aveugle : si ce régime d’exception militaire avait des trophées à brandir, il ne s’en priverait pas — même dans l’évaluation des personnes déplacées intérieures (PDI), le Premier ministre Me Apollinaire Kyelem fait procéder en grande pompe à des recomptages pour finalement annoncer devant l’Assemblée législative de transition un taux de réinstallation ne dépassant pas… 0,5 %, preuve irréfragable que « la peur a changé de camp !  » [1]. À défaut de trophées, on atermoie, on prend des airs convenus, et on annonce que la guerre sera foudroyante pour nos ennemis, qu’elle n’a pas encore commencé, mais que bientôt elle va commencer, et que ce commencement est tellement imminent qu’il va surprendre tout le monde — y compris ceux qui la font ? Toute proportion gardée, la guerre sous le régime du MPSR-II, c’est un peu le Désert des Tartares de Buzzati ; ou, pour prendre une référence plus triviale, l’Arlésienne… On en parle plus qu’on ne la voit jamais dans ses résultats.

Et comme l’ennemi déjoue tous les calculs des militaires mobilisés sur tous les terrains d’opération, on procède à l’interpellation et à l'interrogatoire de tous ceux qui le constatent, par métier et par patriotisme : journalistes, activistes de la société civile, intellectuels, hommes politiques — et demain, hommes d’affaires, hauts fonctionnaires, commerçants, tenanciers de maquis, puisque dans un régime d’exception militaire personne n’est à l’abri des fantaisies de l’arbitraire. On le fait avec des chefs d’accusation dignes d’une série télévisée, on dramatise l’interpellation ou la convocation, on garde à vue, on perquisitionne, on saisit les appareils électroniques, on tente de percer les codes d’accès aux données prétendument sensibles, et, tandis que la capitale bruisse de rumeurs plus folles les unes que les autres, on finit par relâcher les quidams les uns après les autres ; là encore, la réalité des faits est plus têtue que les fantasmes de ceux qui ont mis en branle — pour rien — ce lourd et coûteux dispositif de police ou de gendarmerie.

Il y a, hélas, ceux qu’on parvient à faire déposer à la MACO, non pas pour quelque petit délit d’expression, mais pour des faits concordants d’atteinte grave à la sécurité  — ou tout ce qui revient au même dans le Code pénal, que ce soit ou non tiré par les cheveux, comme, par exemple, le délit de non-dénonciation de délit —, dont on attend de connaître le menu pour juger de la consistance des réquisitions prises à leur encontre, sous l’œil attentif du pouvoir exécutif. Entre certaines mains dociles ou zélées, le droit, ses arguties, ses ambiguïtés, ses silences et son arbitraire toujours dissimulé derrière des principes généraux, est une mine pour espérer intimider ceux qu’on veut réduire au silence, faute de mieux — ou en attendant pire, qui sait ?

Mouvement décolonial. Aucun médecin ne peut préconiser un remède efficace s’il s’appuie sur un diagnostic faux ou biaisé par le seul souci de vouloir paraître plus médecin que tous les autres médecins réunis. On n’est pas médecin seulement d’autorité, mais de pratique. Il y a la théorie, apprise sur les bancs de la faculté ; et il y a la clinique, apprise dans son cabinet, face à face avec des malades. À l’évidence, les militaires du MPSR-II manque de clinique. 

L’ex-président Damiba, lui-même membre du MPSR et figure éminente de la première prise militaire du pouvoir civil, le confessait sans détour : s’il s’agissait de tuer tout le monde, ce serait simple ; et d’ajouter que l’essentiel des combattants armés sont des Burkinabè — ce que le Premier ministre Me Apollinaire Kyelem vient encore de confirmer avec dépit devant les honorables de l’Assemblée législative de transition : « Ceux qui nous attaquent là, c’est des Burkinabè ! [2] » Peut-on parler de guerre lorsque, en face de nos soldats, il y a des hommes tout aussi burkinabè qu’eux-mêmes ? Certes ces hommes révoltés peuvent être influencés par l’extérieur, voire épaulés par des combattants d’une autre nationalité, mais aujourd’hui le nombre fait la qualité. Le Burkina Faso est confronté à une insurrection où des Burkinabè affrontent des Burkinabè, et cette insurrection est politique, dans sa nature, dans son développement et dans sa résolution [3]. L’idéologie religieuse y a sa place — comme jadis l’idéologie marxiste y avait la sienne —, mais le cœur nucléaire de ce mouvement touchant la quasi totalité des communautés rurales du pays est la contestation de l’État républicain, lui-même incarné et défendu à profit par les élites urbaines depuis l’indépendance formelle du Burkina Faso. Pour reprendre partiellement les analyses du philosophe Mohamad Amer Meziane [4], en Afrique, tout mouvement qui s’attaque à la sécularisation de la société et à l’État-nation, comme avatars et métastases de la colonisation, est un mouvement décolonial. Ce renversement de perspective n’est pas facile à envisager, puisque parmi les tenants les plus radicaux de l’anti-néocolonialisme eux-mêmes, dont la figure de proue en Afrique de l’Ouest est Kemi Seba [5], on préfère s’abstenir de trop de commentaires à ce sujet, laissant la main-mise du jihadisme religieux reléguer au second plan la dynamique profonde de l’insurrection en cours presque partout dans le Sahel. Il est parfois plus commode de s’arrêter sur l’arbre plutôt que de voir la forêt qu’il cache — ce qui, nulle part dans le monde, n’a jamais effacé la forêt.   

Pour le dire directement, au moins à titre d’hypothèse pour qui manque de familiarité avec les subtilités de la recherche scientifique, les insurgés et ceux qui en soutiennent le projet politique — et pas forcément tous les moyens de combat — dans les populations rurales proclament haut et fort qu’ils aspirent à retrouver leurs frontières naturelles de sable contre les frontières arbitraires de papier, qu’ils veulent s’affranchir du prêt-à-porter politique des élites urbaines et de l’oligarchie stato-libérale — terme convenu pour désigner les corrompus ayant, au sein de notre État, établi à vie le siège social de leur fonds de commerce mafieux —, et, surtout, qu’il existe dans l’histoire et dans les cultures des peuples burkinabè des formes institutionnelles plus à même de contribuer à l’émancipation partagée de chaque communauté au sein de la Nation. Ce que ne renierait pas forcément Thomas Sankara, dont le faso [6] est une manière plus révolutionnaire de liquider la république héritée de la colonisation, à commencer dans le nom du pays et de ses habitants — ce qui n’a rien de folklorique, ou de botanique par comparaison avec l’usage réticent de nos prénoms du village, puisque ses héritiers malgré lui acceptent, aujourd’hui, de mourir les armes à la main, et en grand nombre, pour faire entendre la voix discordante d’une sorte de faso communautaire [7].  

À suivre :

À Guerre sale, sale paix [2/4]

Dr Évariste Konsimbo

Président du Cercle d’Éveil

[1] Me Apollinaire Kyelem, Premier ministre, Discours à la Nation, Assemblée législative de transition, 30/05/2023. À la date du 23 mai 2023, plus de 20 457 ménages, comprenant plus de 125 227 personnes, sont retournés dans leur localité d’origine, selon un décompte non exhaustif — et non contradictoire — des autorités.

[2] Me Apollinaire Kyelem, Premier ministre, Réponses aux honorables, Assemblée législative de transition, 30/05/2023.

[3] Il ne s’agit pas de nier la présence sur le territoire national de relais d’organisations islamistes d’envergure internationale, comme Al-Qaida ou État islamique, mais de souligner qu’en se focalisant, aujourd’hui encore, sur cette présence, on perd de vue que ces organisations ont pris pied dans des communautés de longue date en rupture de ban, non pas de leur fait, mais du fait de la gouvernance républicaine. L’approche exclusivement militaire de cette crise politique revient à vouloir éradiquer un virus sans jamais poser la question de l’état immunitaire du patient et du sens que celui-ci entend donner à sa vie. La gouvernance républicaine est donc la question centrale, laquelle n’est d’aucun ressort militaire.

[4] Mohamad Amer Meziane. Des empires sous la terre, histoire écologique et raciale de la sécularisation, La Découverte, Paris, 2021.

[5] Kemi Seba, président de l’organisation non gouvernementale Urgences panafricanistes, a pris fait et cause pour les États en place, considérant que le mouvement jihadiste fait partie intégrante d’une action de déstabilisation des pays africains instrumentalisée par les oligarchies occidentales. Il a même préconisé d’envoyer au front des brigades de volontaires issus de son organisation, anticipant d’une certaine manière les Volontaires pour la défense de la patrie (VDP) du pouvoir d’exception militaire du MPSR-II.

[6] On peut faire une lecture verticale de l’ordonnance 84-043/CNR/PRES portant changement d’appellation et symboles de la Nation, celle qui l’a emporté avec la rectification républicaine de Blaise Compaoré, où le Burkina (comme État) efface le Faso (comme entité politique, ou révolutionnaire). On peut aussi constater, sur la base de l’article 3, que le Faso ne se confond pas nécessairement avec le Burkina, qu’il jouit d’une sorte d’autonomie, puisqu’il est défini comme : « (…) l’entité juridique et politique, le foyer imprescriptible où souffle le vent vivifiant de la liberté et de la dignité qui redonne au peuple toute sa grandeur et fait de lui, l’allié naturel de tous les peuples du monde qui partagent les mêmes idéaux de liberté et de dignité. (…) » Ce qui circonscrit le territoire du Faso sankariste, c’est la portée du souffle de la liberté et de la dignité — dont Sankara souhaite qu’il se confonde avec le territoire géographique du Burkina, mais sans certitude, puisqu’il ajoute dans son ordonnance : « Le Faso [et non pas le Burkina] est la patrie du peuple révolutionnaire du Burkina. » Pour qui considère l’État du Burkina comme une tyrannie républicaine à l’encontre des provinces sous son administration, le faso et sa dynamique révolutionnaire pourrait figurer une voie de recours — d’où le fait que certains se demandent si, dans cette crise majeure, le Burkina Faso a besoin de plus de république, ou de plus de faso.

[7] Par pure provocation, voici une question que l’emprise militaire empêche de poser alors qu’elle place le débat politique, social, culturel, voire civilisationnel, au point crucial : où le faso et son idéal sankariste est-il plus une réalité, à Ouagadougou, ou dans la périphérie de Djibo ? Qui incarne le plus la liberté et la dignité aux yeux de ces millions de jeunes ruraux dont la vie dépasse à peine le seuil de survie ; ces militaires qui viennent continuer par la force ce que la loi républicaine a échoué à faire par la persuasion ou la propagande, ou ces “héros improvisés“ qui, parfois avec des moyens d’une barbarie sans nom, leur donnent l’espoir que leur vie vaut plus que la misère et la honte auxquelles elle a été réduite ? Remontons même plus loin dans notre histoire. Qui dans le conflit actuel incarne l’héritage de la guerre du Bani-Volta de 1915-1916 ? Notre armée républicaine, descendante de l’armée coloniale et de ses supplétifs, et bras armé de la conversion républicaine des provinces, au point d’avoir usurpé, quasi continument, le pouvoir politique depuis l’Indépendance ; ou ces insurgés qui refusent désormais que les “étrangers“ de la ville continuent de se mêler de leurs affaires et qui réclament leur souveraineté et leurs territoires comme au temps où les villages nouaient des liens d’allégeance avec des maisons de guerre ? Voir à ce propos : La Guerre coloniale du Bani-Volta, 1915-1916 (Burkina Faso, Mali), Patrick Royer ; in Sociétés dans la guerre, Autrepart, n° 26, Presse de Sciences Po, Paris, février 2003.

Ces questions, un militaire en opération ne peut pas se les poser ; seuls les intellectuels, les scientifiques, les journalistes, la société civile, les citoyens le peuvent, qu’il faut protéger contre tout pouvoir politique qui prétendrait régler la société et ses moyens d’expression comme dans une caserne, par le bâillon et la trique.

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